Notre église Saint Pierre d’Échebrune

Un regard sur l’église St Pierre d’Echebrune

Classée Monument Historique en 1902, elle compte parmi les belles églises romanes de Haute Saintonge.  Mais elle est remarquable à plus d’un titre.  C’est en la regardant bien, telle qu’elle est aujourd’hui, qu’on peut apprécier son caractère et son charme.

De loin et de près, un site hors du commun

Vue de l’ouest, en descendant de Meussac, la façade romane éclairée par le soleil du soir est un spectacle exceptionnel.  Emblématique, avec son fronton triangulaire, ses arcades et son vaste portail, elle est représentée sur le logo de  la commune. Une reproduction de cette façade est la pièce maîtresse de l’exposition d’Art Roman sur l’aire de Lozay sur l’autoroute A10.

Arrivant dans le bourg d’Echebrune, on lève les yeux.  L’église est dans le ciel ! Côté nord, elle est comme perchée sur un flanc rocheux abrupt; les maisons avoisinantes sont en contre-bas, les chemins d’accès à l’ouest et au nord-est sont des grimpettes.

Sans être fortifiée, l’église occupe une place forte naturelle dominant les alentours et visible de loin.

L’église vue du sud : une belle silhouette

L’accès principal actuel est aménagé au sud.  Une allée bordée de tilleuls traverse un grand espace vert avec l’église en toile de fond.  Cette esplanade recouvre l’ancien cimetière, endigué par un mur de soutènement en pierres. 

D’ici l’église se profile contre le ciel dans toute sa longueur, une belle perspective.  On est saisi par l’harmonie et les proportions de l’ensemble.  Et pourtant, quelle histoire mouvementée pour en arriver là !

L’église vue du sud

Les origines

L’église d’origine date de la fin du 12ème siècle.  Elle a été partiellement détruite lors de la Guerre de Cent Ans qui a fait des ravages autour de Pons. De l’église romane, seules subsistent la partie ouest (la nef et la façade) et la tour carrée sous le clocher, partiellement masquée par des contreforts à l’aspect un peu surdimensionné.

La nef romane est gracieuse, typiquement saintongeaise, avec sa corniche, ses ouvertures cintrées et un petit oculus rond assez surprenant au-dessus d’un joli portail latéral.  Regardant de près, on voit que tous ces éléments sont ornés de fins rubans sculptés de motifs variés.

Les reconstructions

Une grande reconstruction est entreprise au 15ème  siècle.  Un chœur gothique, plus élevé que la nef, est érigé à l’est, soutenu par de puissants contreforts.  Un premier clocher octogonal voit le jour.  Ensuite le chœur est élargi au sud par une grande chapelle.

Le clocher actuel date du début du 20ème siècle  Une importante restauration a lieu après le classement de l’église en 1902.  Le clocher gothique disparu au 19ème siècle est reconstruit à l’identique, élégant et élancé.  L’harmonie de l’ensemble est restaurée.

 Le choeur paraît bizarrement tronqué à droite, on remarque une longueur de cheneau en pierre qui dépasse, penchée vers l’est, suspendue en l’air comme témoin d’une dimension perdue. 

Si la face sud est élégante et équilibrée, le nord est moins harmonieux.  De ce côté le terrain dénivelé est problématique, les contreforts sont massifs et on y voit des traces d’un transept disparu. L’effet d’ensemble est plus tourmenté, l’usure du temps et du climat est plus apparente.

La façade ouest : un joyau de l’art roman saintongeais

En approchant par le raidillon à l’ouest, on est dans les pas des pèlerins du Moyen Age.  On les imagine sur la montée découvrant petit à petit ce beau décor créé pour leur émerveillement.

Arrivé sur le parvis le regard est capté par le portail ample et majestueux. Onze colonnes alignées de chaque côté portant six arcs concentriques lui donnent une largeur et une profondeur exceptionnelles.  Certaines colonnes sont ravinées et alvéolées mais la structure et la décoration sont bien conservées.

Prenons du recul pour une vue d’ensemble.

Le portail est flanqué de deux petits arcs latéraux.  Leurs chapiteaux s’enchainent en une magnifique frise végétale qui traverse toute la façade.

D’élégantes colonnes partent de cette frise pour rejoindre la corniche au-dessus. C’est une composition parfaitement maîtrisée, les guides signalent son classicisme, c’est à dire son inspiration de l’antiquité grecque et romaine.

La partie haute, réalisée probablement plus tard par une autre équipe, est plus sobre, élégante et épurée. On remarque les faisceaux de fines colonnettes et la forme originale de la baie centrale encadrant une fenêtre ; on y voit une influence orientale, les croisades ayant marqué l’architecture de l’époque.

Comme sur les murs extérieurs de la nef, tous les éléments de la façade sont surlignés d’une infinie variété de motifs (végétaux, géométriques, abstraits), d’une finesse et d’une précision étonnantes.

Quelques sujets figuratifs se démarquent, les fameux « modillons » : à mi-hauteur, soutenant la corniche, des têtes d’animaux (un taureau particulièrement vivant, un veau, un bélier ?) ; d’étranges créatures du bestiaire (une chouette à visage humain, les yeux exorbités..) ; quelques formes humaines mutilées.  C’est un alignement extraordinaire de sculptures saillantes en alternance avec des « métopes » en bas relief : roues, rosaces et fleurs, toutes différentes mais pleines de charme.

Détail du bandeau de la corniche: modillons et métopes

Plus étonnants encore, les chapiteaux:  des compositions fantasques, parfois grotesques, d’oiseaux et d’étranges créatures groupés ou enlacés.  Libre à nous de les interpréter. Sur les arcades basses les chapiteaux sont particulièrement expressifs, ludiques même.  Tout à gauche, on aperçoit un curieux personnage hirsute et truculent, sans doute un « engoulant » qui nous interpelle !

C’est un art roman tardif, décoratif surtout, sans référence biblique identifiable. A l’époque, les équipes d’artistes et d’artisans se déplaçaient de site en site, rivalisant de créativité et d’expertise.  Ici, pas d’images religieuses ; ces artistes exprimaient leur foi par le raffinement et la beauté de leur art.

Remarques :

Au-dessus du portail, sous la corniche, quatre pierres saillantes soutenaient un « ballet », une sorte d’auvent ou grand porche qui abritait les paroissiens, disparu depuis longtemps mais caractéristique des églises de la région (un exemple subsiste à Mazerolles à l’ouest de Pons).

On peut distinguer, à hauteur d’homme sur la façade , des « graffiti » ou dessins gravés dans la pierre, peut-être par des voyageurs en route pour Compostelle.  On devine des personnages de face ou de profil, une procession de pèlerins marchant avec des bâtons, des cavaliers, une variété de dessins qu’on peut déceler à l’œil nu ou à l’aide d’un appareil de photos.

L’intérieur de l’église

En pénétrant dans l’église on est saisi par son élévation et sa luminosité.  Malgré la destruction de sa voûte pendant les Guerres de Religion, la nef romane a gardé une belle allure avec ses piliers élancés.  Au-dessus, les murs légèrement incurvés laissent deviner la voûte d’origine.

Au 18ème siècle, une élégante galerie a été construite au-dessus de l’entrée de la nef.

Au centre de l’église on peut admirer la coupole du style romano-byzantin typique de notre région. Elle a été reconstruite lors de la réfection du clocher au début du 20ème siècle.

Le chœur gothique et la chapelle sud, qui étaient très délabrés, ont fait l’objet d’une grande rénovation dans les années 1990.  Un lambris de bois clair couvre l’ensemble, reprenant les formes gothiques.  N’en déplaise aux puristes qui parlent de « fausses voûtes », le résultat est original et harmonieux. Une église doit vivre avec son temps. Ce joli bois crée une ambiance chaleureuse et conviviale, l’acoustique est exceptionnelle.  Des vitraux modernes clairs et sobres ont complété cette restauration très réussie.

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